jeudi 10 novembre 2016

Le page du duc de Savoie I - Alexandre Dumas (livre audio) | @ebookaudio

Le page du duc de Savoie I - Alexandre Dumas (livre audio)Emmanuel Philibert, duc de Savoie sans territoires, est le commandant en chef des troupes de Charles Quint en Artois. Il est entouré de son fidèle écuyer Scianca-Fero d'une force redoutable et de son page Léone sensible et frêle auquel il semble tendrement attaché. Il faut dire que Léone est en fait une jeune fille, Léona, qui a dû changer d'identité pour survivre aux ennemis de son père. Le comte de Waldeck ayant commis des actes de pillage, Emmanuel Philibert se voit contraint de le tuer, s'attirant ainsi la haine de son fils 

Extrait : Charles Quint, sur l’Espagne, l’Allemagne, les Flandres, l’Italie et les deux Indes, c’est-à-dire sur un sixième du monde.

La scène s’ouvre aux environs de la petite ville d’Hesdin-Fert, qu’achève de rebâtir Emmanuel Philibert, prince de Piémont, en remplacement d’Hesdin-le-Vieux, qu’il a pris et rasé, l’année précédente. – Donc, nous voyageons dans cette partie de l’ancienne France qu’on appelait alors l’Artois, et qu’on appelle aujourd’hui le département du Pas-de-Calais.
Nous disons de l’ancienne France, car un instant l’Artois a été réuni au patrimoine de nos rois par Philippe-Auguste, le vainqueur de Saint-Jean-d’Acre et de Bouvines ; mais, entré, en 1180, dans la maison de France, donné, en 1237, par saint Louis, à Robert, son frère cadet, il s’égara aux mains de trois femmes : Mahaud, Jeanne Ire et Jeanne II, dans trois maisons différentes. Puis avec Marguerite, sœur de Jeanne II et fille de Jeanne Ire, il passa au comte Louis de Mâle, dont la fille le fit entrer, en même temps que les comtés de Flandres et de Nevers, dans la maison des ducs de Bourgogne. Enfin, Charles-le-Téméraire mort, Marie de Bourgogne, dernière héritière du nom gigantesque et des biens immenses de son père, alla, le jour où elle épousa Maximilien, fils de l’empereur Frédéric III, réunir nom et richesses au domaine de la maison d’Autriche, lesquels s’y engloutirent comme un fleuve qui se perd dans l’Océan.
C’était là une grande perte pour la France, car l’Artois était une belle et riche province. Aussi, depuis trois ans, avec des chances capricieuses et des fortunes diverses, Henri II et Charles Quint luttaient-ils corps-à-corps, pied-à-pied, front contre front, Charles Quint pour la conserver, Henri II pour la reprendre.
Pendant cette guerre acharnée, où le fils retrouvait le vieil ennemi de son père et, comme son père, devait avoir son Marignan et son Pavie, chacun avait rencontré ses bons et mauvais jours, ses victoires et ses défaites. La France avait vu l’armée en désordre de Charles Quint lever le siège de Metz, et avait pris Marienbourg, Bouvines et Dînant ; l’Empire, de son côté, avait emporté d’assaut Thérouanne et Hesdin, et, furieux des défaite de Metz, avait brûlé l’une et rasé l’autre.
Nous avons comparé Metz à Marignan, et nous n’exagérons pas. – Une armée de cinquante mille hommes d’infanterie, de quatorze mille chevaux, décimée par le froid, par la maladie, et, disons-le aussi, par le courage du duc François de Guise et de la garnison française, s’évanouit comme une vapeur, disparut comme une fusée, laissant, pour toute trace de son existence, dix mille morts, deux mille tentes, cent-vingt pièces de canon.
La démoralisation était telle, que les fuyards n’essayaient pas même de se défendre. Charles de Bourbon poursuivait un corps de cavalerie espagnole ; le capitaine qui commandait ce corps s’arrête et va droit au chef ennemi.
— Prince, duc ou simple gentilhomme, lui dit-il, qui que tu sois enfin, si tu combats pour la gloire, cherche une autre occasion ; car, aujourd’hui, tu égorgerais des hommes trop faibles, non seulement pour te résister, mais encore pour prendre la fuite.
Charles de Bourbon remit son épée au fourreau, ordonna à ses hommes d’en faire autant ; et le capitaine espagnol et sa troupe continuèrent leur retraite sans être davantage inquiétés par eux.
Charles Quint avait été loin d’imiter cette clémence. Thérouanne prise, il avait ordonné que la ville fût livrée au pillage, rasée jusqu’en ses fondements ; qu’on détruisît, non seulement les édifices profanes, mais encore les églises, les monastères et les hôpita
ux ; qu’on n’y laissât, enfin, aucun vestige de muraille, et, de peur qu’il n’y restât pierre sur pierre, il requit les habitants de la Flandre et de l’Artois pour en disperser les débris.

L’appel de destruction avait été entendu. Les populations de l’Artois et de la Flandre, auxquelles la garnison de Thérouanne causait de grands dommages, étaient accourues armées de pioches, de marteaux, de hoyaux et de pics, et la ville avait disparu comme Sagonte sous les pieds d’Annibal, comme Carthage au souffle de Scipion.



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