La suite de «La reine Margot». Deuxième partie de la trilogie sur les guerres de religion, entre La Reine Margot et Les Quarante-Cinq. Henri III a succédé à son frère Charles IX sur le trône de France. Henri est un roi superstitieux et indécis qui laisse gouverner sa mère, Catherine de Médicis. Le pays est toujours divisé par les luttes entre catholiques et protestants et le roi ne peut compter que sur quelques amis : ses mignons, Saint-Luc, et surtout son bouffon, Chicot, en qui il a toute confiance. Il doit notamment sans cesse composer avec son frère le duc d'Anjou et se défier de nombreux ennemis, dont les Guise qui ont créé une Ligue de catholiques. Extrait : Le repas avait eu lieu au Louvre, et le roi, qui avait consenti à grand-peine au mariage, avait paru au festin avec un visage sévère qui n’avait rien d’approprié à la circonstance. Son costume, en outre, paraissait en harmonie avec son visage ; c’était ce costume marron foncé sous lequel Clouet nous l’a montré assistant aux noces de Joyeuse, et cette espèce de spectre royal, sérieux jusqu’à la majesté, avait glacé d’effroi tout le monde, et surtout la jeune mariée, qu’il regardait fort de travers toutes les fois qu’il la regardait.
Cependant cette attitude sombre du roi, au milieu de la joie de cette fête, ne semblait étrange à personne ; car la cause en était un de ces secrets de cour que tout le monde côtoie avec précaution, comme ces écueils à fleur d’eau auxquels on est sûr de se briser en les touchant.
À peine le repas terminé, le roi s’était levé brusquement, et force avait été aussitôt à tout le monde, même à ceux qui avouaient tout bas leur désir de rester à table, de suivre l’exemple du roi.
Alors Saint-Luc avait jeté un long regard sur sa femme, comme pour puiser du courage dans ses yeux, et s’approchant du roi :
— Sire, lui dit-il, Votre Majesté me fera-t-elle l’honneur d’accepter les violons que je veux lui donner à l’hôtel de Montmorency, ce soir ?
Henri III s’était alors retourné avec un mélange de colère et de chagrin, et, comme Saint-Luc, courbé devant lui, l’implorait avec une voix des plus douces et une mine des plus engageantes :
— Oui, monsieur, avait-il répondu, nous irons, quoique vous ne méritiez certainement pas cette preuve d’amitié de notre part.
Alors mademoiselle de Brissac, devenue madame de Saint-Luc, avait remercié humblement le roi. Mais Henri avait tourné le dos sans répondre à ses remerciements.
— Qu’a donc le roi contre vous, monsieur de Saint-Luc ? avait alors demandé la jeune femme à son mari.
— Belle amie, répondit Saint-Luc, je vous raconterai cela plus tard, quand cette grande colère sera dissipée.
— Et se dissipera-t-elle ? demanda Jeanne.
— Il le faudra bien, répondit le jeune homme.
Mademoiselle de Brissac n’était point encore assez madame de Saint-Luc pour insister ; elle renfonça sa curiosité au fond de son cœur, se promettant de trouver, pour dicter ses conditions, un moment où Saint-Luc serait bien obligé de les accepter.
On attendait donc Henri III à l’hôtel de Montmorency au moment où s’ouvre l’histoire que nous allons raconter à nos lecteurs. Or il était onze heures déjà, et le roi n’était pas encore arrivé.
La dame de Monsoreau I - Alexandre Dumas (livre audio) | @ebookaudio
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